Homélie du 18 février

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Homélie du 1er dimanche de Carême 18 février 24
« Jésus venait d’être baptisé. Aussitôt l’Esprit le pousse au désert… »
Marc, dans sa relation, est très sobre sur cet épisode « au désert ». Jésus vient de recevoir de son
Père sa reconnaissance : il est Fils de Dieu, il est le Messie envoyé du Père. Le désert, dans la Bible,
tient beaucoup de place et Jésus ne pouvait être reconnu comme Messie de Dieu sans passer ainsi
par ce lieu aride, mais aussi lieu de rencontre avec lui-même et avec Dieu. Le désert,un lieu un peu
mystérieux où il n’y a pas de faux-semblant. Nous y sommes face à nous-mêmes et il est temps de
faire le point. Je ne peux parler du désert sans penser à ce que j’ai vécu un jour avec mon confrère
Claude, dans le désert du Ténéré au Sénégal. Un silence étourdissant, profond vous entoure. Claude
qui connaissait bien son désert me disait : « Tu ne vois rien, mais il y a des centaines d’yeux qui te
voient, qui te scrutent. » Et c’était bien vrai puisqu’aussitôt entrés dans son dispensaire, une foule
s’est emparée de tout ce qui pouvait faire du bruit, vieux bidons et instruments rudimentaires et tout
le monde dansait dans un rythme effréné. Le désert habité. Et le lendemain le rendez-vous de tous
les bergers avec leurs troupeaux autour du point d’eau, qui avec des ânes , qui avec des chameaux.
Jésus n’était pas au désert, seul, solitaire. Il y était avec toute l’humanité qu’il est venu sauver. C’est
ainsi que je vois le désert dont Jésus fait l’expérience et dont il nous invite nous aussi à faire
l’expérience.
Nous sommes au monde et parfois nous avons l’impression d’être dans un désert, tant ce monde peut
sembler aride et sans joie. Oh, il est peuplé, mais partout l’homme semble vivre seul. La guerre se
réveille un peu partout. La solitude tue les personnes. Beaucoup doivent fuir leurs terres pour
chercher un monde meilleur. Les bandes rivales se font une guerre sans merci et tant pis pour la vie
d’hommes sacrifiée. Oui je dirais plutôt que ce monde n’est pas désert. Il est une jungle alors que
des personnes, de belles personnes se sont levées pour donner sens à notre vie humaine. Je pense à
cet homme qui nous a quittés récemment, je veux dire Robert BADINTER. Cet homme qui aurait
pu en vouloir au monde entier, vu ce qu’il a subi, cet homme a condamné la peine de mort : fini la
justice qui tue, disait-il. Il faut du courage, au cœur de cette jungle pour faire entendre ce cri de
liberté.
Dans la Genèse, Dieu nous dit comme à Noé : « Voici que moi j’établis mon alliance avec vous,
avec votre descendance après vous et avec tous les êtres vivants qui sont avec vous » Dieu connaît
l’homme qu’Il a créé et à cet homme Il propose une alliance, un trait d’union indéfectible. Cette
alliance, c’est Jésus qui la porte depuis sa naissance parmi nous. Il connait notre condition d’homme
puisqu’il a épousé notre humanité en prenant corps de la Vierge Marie. Il a tellement pris notre
humanité qu’il accepte, comme nous, d’être tenté. Marc ne nous dit pas en quoi il est tenté, mais
nous le savons par les autres évangélistes : goût du pouvoir, de la domination, de l’avoir, de prendre
la place de Dieu lui-même, de se faire Dieu à la place de Dieu. Nous reconnaissons bien notre
monde dans ces tentations. Elles sont toujours là. Nous voulons dominer, et nous voulons nous
approprier les biens de la terre. Laissons donc Dieu, en Jésus, réaliser la véritable alliance entre Lui
et les hommes.
Saint Pierre nous rappelle que nous sommes sauvés par la résurrection de Jésus, par le baptême que
nous avons reçu et qui nous fait « prêtres, prophètes et rois ». Ce baptême est le signe de cette
alliance que Dieu a voulu pour chacun de nous. Mais il faut savoir redécouvrir le sens de ce
baptême. Jésus ne part-il pas au désert à la suite du baptême donné par Jean. Là-bas il sera
tenté,mais il est aussi en profonde communion avec son Père. La tentation ne nous coupe pas du
tout de notre Dieu. Et Dieu est toujours là pour nous aimer, pour nous remettre en relation avec lui
et avec les autres.
Ce carême qui est là depuis mercredi est un temps favorable pour retisser l’alliance avec notre
Dieu en Jésus-Christ. A nous d’en faire un temps de grâce, un temps de VIE !